En fin de carrière mais toujours en forme, Hubble vient d'établir un nouveau un record de distance : une vigoureuse petite galaxie aperçue à 13,4 milliards d’années-lumière. Nous la voyons donc telle qu'elle était seulement 400 millions d’années après le Big Bang. Impressionnés, les chercheurs sont également surpris par ses caractéristiques précoces. Le vieux télescope spatial empiète ainsi sur le territoire qu'exploreront ses successeurs, JWST et WFirst.
Le 07/03/2016 à 09:34 - Xavier Demeersman, Futura-Sciences
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Les galaxies se bousculent dans cette partie du ciel boréal qui ne représente qu’une petite parcelle de la constellation de la Grande Ourse (voir vidéo ci-dessous). L’image est extraite du vaste sondage GOODS north (Great Observatories Origins Deep Survey North) réalisé avec le télescope spatial Hubble. L’encadré dévoile GN-z11, une jeune galaxie distante de 13,4 milliards d’années-lumière qui a le ventre plein d’étoiles ardentes et brille beaucoup pour son âge. © Nasa, Esa, P. Oesch (Yale University)
Les galaxies se bousculent dans cette partie du ciel boréal qui ne représente qu’une petite parcelle de la constellation de la Grande Ourse (voir vidéo ci-dessous). L’image est extraite du vaste sondage GOODS north (Great Observatories Origins Deep Survey North) réalisé avec le télescope spatial Hubble. L’encadré dévoile GN-z11, une jeune galaxie distante de 13,4 milliards d’années-lumière qui a le ventre plein d’étoiles ardentes et brille beaucoup pour son âge. © Nasa, Esa, P. Oesch (Yale University)
En orbite autour de la Terre depuis déjà un quart de siècle, Hubble est un vétéran qui a toujours bon pied bon œil. Le télescope spatial est une fois de plus capable de prouesses impressionnantes comme vient de le montrer une équipe internationale qui l’a poussé dans ses limites pour débusquer une très jeune galaxie dans les confins de l’Univers.
Tapie à environ 13,4 milliards d’années-lumière de la Terre, en direction de la constellation de la Grande Ourse, elle se montre telle qu’elle était il y a 13,4 milliards d’années…, c’est-à-dire 400 millions d’années seulement après le Big Bang ! « Nous avons fait un grand pas en arrière dans le temps, bien au-delà de ce que nous nous attendions à être en mesure de faire avec Hubble, déclare Pascal Oesch, de l’université de Yale, qui a dirigé ces recherches à paraître le 8 mars dans The Astrophysical Journal (disponible ici). Nous voyons GN-z11 à un moment où l’Univers n’avait seulement que 3 % de son âge actuel ».
Le précédent record de distance nous dévoilait une jeune galaxie située à environ 13,2 milliards d’années-lumière (décalage vers le rouge de 8,68) de la Terre. Hubble vient de franchir les limites qu’on lui supposait, révélant un bébé galactique à quelque 13,4 milliards d’années-lumière (décalage de 11,1). L’Univers n’avait alors que 400 millions d’années. © Nasa, Esa, P. Oesch (Yale University), G. Brammer (STScI), P. van Dokkum (Yale University), G. Illingworth (University of California, Santa Cruz)
Le précédent record de distance nous dévoilait une jeune galaxie située à environ 13,2 milliards d’années-lumière (décalage vers le rouge de 8,68) de la Terre. Hubble vient de franchir les limites qu’on lui supposait, révélant un bébé galactique à quelque 13,4 milliards d’années-lumière (décalage de 11,1). L’Univers n’avait alors que 400 millions d’années. © Nasa, Esa, P. Oesch (Yale University), G. Brammer (STScI), P. van Dokkum (Yale University), G. Illingworth (University of California, Santa Cruz)
On se rapproche du début de l’ère de réionisation
Puisque notre Univers est en expansion, toutes les galaxies que nous observons semblent nous fuir, et cela d’autant plus vite qu’elles sont éloignées de nous. Cela se traduit par un décalage vers le rouge (redshift, en anglais) dans le spectre électromagnétique. Ainsi, avec un décalage (z) de 8,68, EGSY8p7 détenait le précédent record : environ 13,2 milliards d’années-lumière (on est 600 millions d’années après le Big Bang). Avec l’instrument WFC3 (Wide Field Camera 3) d’Hubble, l’équipe a pu disséquer la lumière de GN-z11 et mesurer précisément sa distance. Avec un décalage de 11,1, le précédent record de distance vient d’être pulvérisé.
« Le détenteur du précédent record a été vu au milieu d’une période où la lumière des étoiles des galaxies primordiales commençait à chauffer et dissiper un brouillard froid d’hydrogène, explique Rychard Bouwens, de l’université de Leiden (Pays-Bas), coauteur de l’étude. Une époque de transition appelée ère de la réionisation. Quant à GN-z11, nous la voyons 150 millions d’années plus tôt, peu après le début de cette transition dans l’évolution de l’Univers. »
GN-z11 est une jeune galaxie plus brillante que prévu, comme l'ont montré Spitzer et Hubble. Bien que plus petite que la Voie lactée, elle donne naissance à 20 fois plus d’étoiles. © Nasa, Esa, P. Oesch (Yale University), G. Brammer (STScI), P. van Dokkum (Yale University), G. Illingworth (University of California, Santa Cruz)
GN-z11 est une jeune galaxie plus brillante que prévu, comme l'ont montré Spitzer et Hubble. Bien que plus petite que la Voie lactée, elle donne naissance à 20 fois plus d’étoiles. © Nasa, Esa, P. Oesch (Yale University), G. Brammer (STScI), P. van Dokkum (Yale University), G. Illingworth (University of California, Santa Cruz)
Encore petite, GN-z11 enfante 20 fois plus d’étoiles que la Voie lactée
GN-z11 se montre plus brillante que prévu par la théorie pour son âge. Elle est d’ailleurs si lumineuse que des observations relativement détaillées ont pu être réalisées. En combinant la vision perçante des télescopes spatiaux Hubble et Spitzer, les chercheurs ont pu déterminer qu’elle est 25 fois plus petite que notre Voie lactée (qui mesure 100.000 années-lumière de diamètre). Sa masse de matière sous forme d'étoiles est pour l’instant d'un centième de celle de notre galaxie, estimée à environ 200 milliards de fois celle du Soleil.
« Pour l’instant », car cet enfant galactique est plein de promesses. Sa croissance est rapide : 20 fois supérieure à celle, au ralenti, que connaît actuellement notre bonne vieille galaxie spirale. Une moyenne de 24 nouvelles étoiles sortent chaque année des usines (nuages de gaz et de poussières) au sein de GN-z11. « C’est étonnant qu’une galaxie si massive existât seulement de 200 à 300 millions d’années après que les premières étoiles aient commencé à se former », commente Garth Illingworth de l’université de Californie. Une vraie surprise partagée par toute l’équipe. En effet, « […] comme l’ont suggéré nos précédents travaux, des galaxies aussi brillantes ne devraient pas exister si tôt dans l’Univers », indique Marijn Franx, coauteur et chercheur à l’université de Leiden.
En direction de la constellation de la Grande Ourse, il y a relativement peu d’étoiles de notre galaxie, la Voie lactée, si bien que le ciel nous ouvre là de belles fenêtres sur l’Univers. C’est dans l’une d’elles qu’Hubble a débusqué l’objet GN-z11 qui pulvérise le précédent record de distance. © Nasa, Esa, G. Bacon (STScI)
Hubble nous offre un avant-goût des futures observations du JWST et WFirst
Il reste encore beaucoup de choses à apprendre sur cette période. « Comment GN-z11 s’est créée reste un mystère pour l’instant. Probablement voyons-nous les premières générations d’étoiles se former autour des trous noirs ? » estime Ivo Labbe qui a également participé à cette exploration des confins de l’Univers.
Qui mieux que le très prometteur JWST, le James Webb Space Telescope, dont le lancement est prévu fin 2018, pourra sonder ces régions lointaines pour nous éclairer sur les étapes de la formation des premières étoiles et galaxies ? Avec cette découverte, Hubble a déjà empiété sur le territoire de chasse du futur télescope spatial et aussi de celui d’un autre successeur, désormais en chantier, WFirst (Wide-Field Infrared Survey Telescope) dont le champ sera 100 fois plus étendu que celui du vénérable Hubble.
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